Note de lecture

Séverine, L’insurgée, L’échappée – par Charles Jacquier

Sympathisante libertaire et proche de Jules Vallès, Sévérine (Caroline Rémy, dite – 1855-1929) fut l’une des premières femmes journalistes. Au cours de sa vie, elle écrira plus de 6 000 articles et quelques livres mais c’est, aujourd’hui, une figure oubliée dont, avant le présent livre, aucun titre n’était disponible. Cette édition, réussie tant dans la forme que sur le fond, devrait attirer à nouveau l’attention sur elle, tout du moins on peut l’espérer. Préfacé par l’écrivain Paul Couturiau, à qui l’on doit la dernière biographie en date de Séverine, elle aussi épuisée, et postfacé par deux enseignantes de lettres modernes en lycée, Laurence Ducousso-Lacaze et Sophie Muscianese, fondatrices de l’association « les Ami.es de Séverine », ce recueil reproduit, dans l’ordre chronologique, quarante-cinq de ses articles, de 1886 à 1921, chacun d’entre eux étant précédé d’une courte introduction qui permet de le contextualiser.

Le lecteur y retrouvera les principaux thèmes d’intervention de Sévérine dans une époque où la presse écrite domine le débat public, mais avant tout il faut rappeler la figure tutélaire de Jules Vallès qu’elle rencontre à Bruxelles en 1879. Dès lors, elle va le seconder dans son travail journalistique, devenant sa plus proche collaboratrice lorsque le romancier relance le Cri du peuple que finance le compagnon d’alors de Séverine, Adrien Guebhardt. Elle dirigera ce journal après la mort de Vallès en 1885, mais le quittera quelques années plus tard à la suite d’un différend avec les autres rédacteurs qu’elle juge sectaires. On ne peut pas parler de Séverine, non plus, sans rappeler ses propos les plus célèbres, dans un article de 1887 : « Avec les pauvres toujours – malgré leurs erreurs, malgré leurs fautes… malgré leurs crimes ! » Il faudrait aussi évoquer son féminisme et ses évolutions, son refus du sectarisme, les beaux portraits qu’elle brosse de ses contemporains (par exemple Sarah Bernhardt, Jean Grave, Victor Hugo, Jules Joffrin, Félix Pyat, Emile Zola), sachant pour chacun d’entre eux faire la part des choses, y compris pour ceux qui l’ont attaquée (Barbey d’Aurevilly). Elle n’hésite pas non plus à écrire dans la presse adverse, par exemple dans le journal monarchiste Le Gaulois pour demander aux lecteurs d’aider les familles de mineurs victimes d’un coup de grisou, et son appel sera entendu. Elle écrira aussi brièvement dans La Libre Parole d’Edouard Drumont, un antisémite notoire, quand le reste de la presse lui est fermé sans, bien sûr, partager les idées de son fondateur puisqu’elle sera l’une des premières à rejoindre Zola dans la défense de Dreyfus, participant dès le début, et jusqu’à la fin de ses jours, à la Ligue des droits de l’homme.

Personnage attachant, non exempt d’erreurs ou de contradictions durant son long parcours de journaliste engagée, Séverine a pu écrire : « Quiconque a éprouvé de la joie devant un livre, un tableau, une statue, quiconque a ressenti du plaisir à entendre la voix humaine parler ou chanter, à écouter les mélodies savantes ou simples errer à travers l’orchestre, se sent le débiteur de l’artiste qui l’a tenu sous le charme, qui lui a donné l’exquise sensation du beau. » En la lisant aujourd’hui, nous en sommes aussi, à notre manière, les débiteurs.

Charles Jacquier

François Bordes, Zone perdue, par Anne Mulpas

Zone perdue – fragments d’itinérance. Je reprends ma chronique. Sa première version date déjà d’il y a trois semaines. A L’ours & la vieille grille. Sa deuxième version s’impose après mon cheminement dans l’exposition Rothko. Me voici au troisième temps du texte, à moins que ce ne soit le quatrième, le centième…

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Étienne Faure, Vol en V, éditions Gallimard – par Anne Gourio

Note de lectureComme on suit, fasciné, la trajectoire des oiseaux migrateurs, le dernier recueil d’Etienne Faure puise dans le ballet aérien de leur « vol en V » un sens de l’élan, du franchissement, du frayage qui se nuance en légères et souples inflexions au fil des espaces traversés à...

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Frédérique Guétat-Liviani, Il ne faudra plus attendre un train, éditions LansKine – par Étienne Faure

Ce recueil emprunte son titre à l’une des trois parties qui le composent : si c’était le cas, (passe) ; il ne faudra plus attendre un train. En découvrant cette composition, on pense spontanément à un ensemble où viendrait s’intercaler le texte de (passe). Puis l’œil et l’oreille distinguent vite une même voix, dans ces deux pans, deux partis pris formels différents dans le cheminement de l’écriture de Frédérique Guétat-Liviani.

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Le journal des poètes 1/2022 – par Nicolas Rouzet

Le Journal des Poètes, numéro 1 de l’année 2022 – La langue est aussi frontière, nous dit Jean-Marie Corbusier, pratiquer un art, c’est toujours ouvrir quelque chose qui est présent autour de nous. C’est d’un même esprit d’ouverture que témoignent les poètes luxembourgeois auxquels est consacré le dossier présenté par Florent Toniello. Ici les langues dépassent les frontières, elles se chevauchent…

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