Note de lecture
Max Alhau, En d’autres lieux, par Sylvestre Clancier
Max Alhau, En d’autres lieux, Voix d’encre, 2023.
En d’autres lieux, le nouveau livre /poème de Max Alhau, transporte dans un ailleurs familier celles et ceux qui lisent et apprécient l’œuvre poétique de ce poète contemporain majeur, membre de l’Académie Mallarmé, que les plus grands prix de poésie ont honoré à juste titre depuis quelques décennies.
C’est la huitième fois que Max Alhau publie chez Voix d’encre un éditeur de grande qualité. On avait particulièrement apprécié, en 2021, Des pas sous le sable, livre dans lequel le poète nous captait par sa voix singulière et poignante qui mieux que d’autres sait dire avec pudeur et gravité la solitude et la mélancolie après la perte de l’être aimé, l’éclat tragique de la mémoire ensevelie et l’éphémère passage qu’est notre vie.
Son nouveau livre est composé comme une pièce musicale en trois mouvements : 1 / Le temps de la mémoire, 2 / Paysages – Rencontres, 3 / L’absence et l’infini. A travers ces trois temps, Max Alhau compose un chant poétique majeur pour dire l’improbable voyage qu’aura été la vie.
Ainsi le poète témoin oscille-t-il entre des terres anciennes, des visages, entrevus dans nos rêves qu’il faudrait défricher et un âpre constat : « On ne retourne jamais au pays natal / le feu a dévasté les souvenirs / que l’on guettait dans les recoins, au cœur de rêves trahis par la mémoire. » Il poursuit en chasseur solitaire des fantômes tenaces et s’interroge ne sachant comment nommer ce qui résiste : « Ni mémoire, ni présent, peut-être ombre ou vent, naguère ou autrefois. » Il y eut pourtant des jours bruissant de lumière, des jours de vendanges, des étés sans pareil. Ici la haute poésie de Max Alhau devient philosophie existentielle quand il s’interroge sur leur passage, car ce furent « des jours de haute rêverie qui firent commerce avec un temps affranchi de toute durée, des jours d’espoir lourds et durables, issus d’un monde dont tu ignorais la présence, la saveur et que tu n’as pas reniés, telle une fable sans auteur ni témoin d’aucune sorte ». Telle est l’énigme qu’affronte sans cesse le poète, ce n’est pas nouveau dans son œuvre, mais ici l’interrogation est plus poignante que jamais.
Dans le second mouvement, le poète s’interroge pour savoir à quelle rencontre se porte –t-il ? Sans doute « à la rencontre de continents invisibles, jamais atteints, toujours à portée de mots, pas davantage. » Max Alhau est lucide, le seul pouvoir du poète est celui des mots. Ces mots qui hélas trop souvent échouent à dire plus que « le regret d’avoir négligé un regard maintenant gommé à jamais. » Car de ce qui brûle on ne saurait être témoin, on s’aventure dans des impasses pour inventer des oasis ajournant le désert.
La solitude s’inscrit dans le troisième mouvement, L’absence et l’infini, à la fin duquel le poète s’en remet au lecteur, celle ou celui qui voudra recueillir sa voix en assurer l’éternité ou peu s’en faut. On ne peut que lui donner raison la voix d’Orphée traverse bien les temps, les lieux, pour dire aux humains que l’attente et la quête sont bien ces autres lieux, ces autres temps qui sont le fondement et le sens de leur existence, mais qui restent une énigme. L’aimée aujourd’hui disparue est « celle pour qui l’absence est la halte dernière, celle qui avec le temps et sa cohorte des saisons affronte l’éternité. » Elle est « celle qui s’est égarée dans ses rêves mais hante toujours ceux de l’autre. » Pour le poète, une absence n’est pas le fruit de l’oubli, simplement une douleur qui partage le temps entre deux équivoques. Il cherche d’une part ce qui n’a plus cours et se trouve saisi par l’effroi de ne plus reconnaître ce qui fut quête d’une éternité déjà révolue, d’autre part il cède à la lumière dont il sait les pouvoirs et qui le renvoie vers des temps sans durée. Comment pourrait-il évincer l’absence ? Comment évincer la douleur ? Il ne suffit pas de faire comme si les mots s’écrivaient en blanc et les paroles différaient toute échéance.
Laissons place au poème final, l’un des plus beaux de la poésie française :
Une voix qui perdure
qui ne se soucie plus du temps,
d’une présence illusoire.
Une voix, autrement dit personne,
grossissant le silence et la mémoire,
ce qui reste d’un feu dont les cendres
ont été soudain balayées.
Une voix toujours à l’affût
de qui voudra la recueillir
en assurer l’éternité
ou peu s’en faut.
Sylvestre Clancier
Christophe Mahy, Au bout du compte, suivi de L’âme au large, Gallimard, par Étienne Faure
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Marilyne BERTONCINI et Wanda MIHULEAC, Sable (Sand), Ed Transignum, par Murielle COMPÈRE-DEMARCY
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Gaëlle Fonlupt, A la chaux de nos silences, ed. Corlevour, par Anne Mulpas
D’un titre – à l’oeil, ce qu’il cherche à entendre de lui-même et du monde. D’un titre, son pouvoir d’accroche, d’évocation. Ciel-qui-lit, ESPRIT ET CIE flashent quelques images en excès de vitesse…
Panaït Istrati, Présentation des Haïdoucs, L’échappée, par Charles Jacquier
Présentation des Haïdoucs est le troisième volume de la tétralogie de l’écrivain roumain d’expression française Panaït Istrati (1884-1935) Les Récits d’Adrien Zograffi, mais chacun d’entre eux peut être lu séparément et celui-ci ne fait pas exception à la règle…
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« Poète n’est pas doué pour habiter le monde, c’est le monde qui l’habite, et fait de lui un éternel passeur d’errances. » Justin Delareux est de ceux-là…
Serge Airoldi, Micmac Mécanic, ed. de l’Attente, par Anne Mulpas
Avant, juste au seuil du Tout premier jour — Jarry & Pasolini. Carpe, écrevisse, tanche… ciel-qui-lit se fait serrer direct par un « lacet magique ». Micmac Mécanic. Quezako ?…
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Aujourd’hui que nous ne recevons (presque) plus de catalogues d’éditeurs (certains se rappellent peut-être ces petits cartons insérés dans chaque ouvrage et qu’il suffisait de remplir et renvoyer pour « être tenu informé de nos publications »…
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Zone perdue – fragments d’itinérance. Je reprends ma chronique. Sa première version date déjà d’il y a trois semaines. A L’ours & la vieille grille. Sa deuxième version s’impose après mon cheminement dans l’exposition Rothko. Me voici au troisième temps du texte, à moins que ce ne soit le quatrième, le centième…
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Journaliste, biographe, critique littéraire et romancière, Alicia Dujovne Ortiz, née en 1940 à Buenos Aires, s’est exilée en France en 1978 au moment de la dictature militaire et y vit encore aujourd’hui…
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Colette Klein, Après la fin du monde, par Sylvestre Clancier
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Élisée Reclus, Histoire d’une montagne Histoire d’un ruisseau, par Charles Jacquier
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François Migeot, Au fil de la chute, par Pierrick de Chermont
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Jean Luc Marion, La métaphysique et après, par Pierrick de Chermont
Cet ouvrage, comme souvent chez l’académicien phénoménologue, est un récit fleuve portant sur l’enquête historique d’un concept : celui de la métaphysique
Robert Desnos, Poèmes de Minuit – par Jean-Paul Rogues
On ne peut s’empêcher de penser au dîner où un officier allemand déclare « il paraît que l’on vient d’arrêter vos deux plus grands poétes »
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Sabine Huynh, Elvis à la radio, Maurice Nadeau – par Pierrick de Chermont
Finissant ce récit, je m’écriai pour moi-même : « Que de souvenirs pour une sans-mémoire !
Pierre Bergounioux, La Gorge, Fata Morgana – par Jean-Paul Rogues
Avec La Gorge, Pierre Bergounioux entre dans le cercle de ceux, les rares qui, par leur prose, nous font franchir un seuil…
Ariel Spiegler, Le Mélange de l’eau, Corlevour – par Anne Mulpas
Soir de février — 33e jour d’hiver sans pluie, souffle Iannis devant la Nouvelle Étoile
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Luis Mizon, par Sylvestre Clancier
Notre ami, le poète Luis Mizon, membre de l’Académie Mallarmé, nous a quittés à l’âge de 80 ans, le 30 décembre dernier.
Stéphane Barsacq, Solstices, Corlevour – par Pierrick de Chermont
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François Sureau, Un an dans la forêt, Gallimard – par Pierrick de Chermont
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Ervé, Écritures carnassières, Maurice Nadeau, coll. à vif – par Pierrick de Chermont
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Après les volumes Stratégie, Poésie etc., Marx Hegel (voir Phoenix, n° 32 & 36), ce nouveau volume des fiches de lecture de Guy Debord, conservées à la Bibliothèque nationale de France, est consacré à l’histoire.
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Note de lectureComme on suit, fasciné, la trajectoire des oiseaux migrateurs, le dernier recueil d’Etienne Faure puise dans le ballet aérien de leur « vol en V » un sens de l’élan, du franchissement, du frayage qui se nuance en légères et souples inflexions au fil des espaces traversés à...
Justyna Bargielska, L’enfant des dons, éditions LansKine – par Étienne Faure
C’est en version bilingue, grand luxe en ces temps, que le sixième recueil de la poète polonaise, Justyna Bargielska, est présenté par Isabelle Macor, traductrice, qui donne quelques repères décisifs en postface pour une entrée en matière dans ces trente-trois textes…
Frédérique Guétat-Liviani, Il ne faudra plus attendre un train, éditions LansKine – par Étienne Faure
Ce recueil emprunte son titre à l’une des trois parties qui le composent : si c’était le cas, (passe) ; il ne faudra plus attendre un train. En découvrant cette composition, on pense spontanément à un ensemble où viendrait s’intercaler le texte de (passe). Puis l’œil et l’oreille distinguent vite une même voix, dans ces deux pans, deux partis pris formels différents dans le cheminement de l’écriture de Frédérique Guétat-Liviani.
Eric Villeneuve, Tache jaune Monochrome bleu Sorte de blanc, éditions LansKine – par Étienne Faure
Eric Villeneuve est-il un grand enfant, nourri aux contes et au Danemark d’Andersen, entre Odense et Skagen ? Cet auteur qu’on a pris l’habitude de lire sous la rubrique « roman », livre ici un recueil un rien hybride qui prend son départ dans la force des mots, leur indépendance, dont, à la source, ceux de « Jensens, Brohus Odense ».
Thierry Romagné, Trois feux de langue, éditions Rehauts – par Étienne Faure
Un recueil qui commencerait par « Ahh, ahh, brr ! » et se clôturerait par « enfin en feu » serait bien prometteur. Un texte polyglotte prêt à tout. C’est en effet ce qui arrive au lecteur en découvrant cet étonnant et riche ensemble dont certains poèmes, pour notre bonheur, avaient d’abord paru dans plusieurs revues.
Le journal des poètes 1/2022 – par Nicolas Rouzet
Le Journal des Poètes, numéro 1 de l’année 2022 – La langue est aussi frontière, nous dit Jean-Marie Corbusier, pratiquer un art, c’est toujours ouvrir quelque chose qui est présent autour de nous. C’est d’un même esprit d’ouverture que témoignent les poètes luxembourgeois auxquels est consacré le dossier présenté par Florent Toniello. Ici les langues dépassent les frontières, elles se chevauchent…